Présences électronique 2023

Posté par Olivier Cresson Il y a 1 année

Présences électronique 2023Présences électronique est un festival organisé par l'INA grm à la Maison de la Radio.

Les concerts des Présences Électronique se sont déroulés du 14 au 16 Avril 2023, une nouvelle fois au Studio 104 de la Maison de La Radio à Paris. Trois soirs durant, des artistes du monde de la musique électro-acoustique et électronique sont invités à jouer leurs oeuvres sur l'Acousmonium du GRM (Groupe de Recherches Musicales), déployé pour l'occasion.

Dispositif de diffusion multi-canal conçu par François Bayle en 1974, ce sound-system spécialisé peut également être pensé comme un orchestre composé de plusieurs dizaines d'enceintes. Chaque enceinte est positionnée de façon à rendre possible une spatialisation complexe des oeuvres diffusées. Les différents modèles sont sélectionnés selon leur capacité à restituer de façon nuancée les textures et les contrastes de fréquence et d'amplitude.

Chaque années depuis 2005, pendant plusieurs semaines, les compositeurs préparent une pièce qui exploite l'acousmonium ou adapte une oeuvre existante pour en tirer parti. Cette oeuvre, nouvelle ou étoffée, sera ensuite restituée le soir du concert dans une pénombre totale, exception faite pour quelques faisceaux colorés sur les décorations murales du Studio et le centre de la scène quand l'artiste s'y produit. Le plus souvent, il sera plutôt derrière la console de mixage située au centre des gradins pour contrôler la diffusion de sa pièce par un orchestre inanimé, le regard fixé vers le public.

Chaque concert, composé de cinq performances, est introduit par la diffusion d'une pièce historique de musique électro-acoustique ou concrète, parfois jouée par l'artiste en personne dans le cas de Michèle Bokanowski ce samedi. Les artistes invités peuvent être d'horizons très variées mais ont tous la particularité d'avoir une approche expérimentale du matériau sonore qu'ils travaillent. A minima leur oeuvre s'inscrit de près ou de loin dans une démarche concrète, où la manipulation du son comme objet et de ses propriétés est centrale à l'oeuvre plutôt que périphérique.

Les différentes performances révèlent ainsi un panel d'approches et de pratiques de ce type de musique et autant de façons d'exploiter l'acousmonium. Certains artistes utilisent le système pour des performances résolument bruitistes faisant usage de sons très abrasifs, de ruptures abruptes et de murs de son chaotique s'étendant sur toute la surface du spectre (Romain Perrot, Jérome Noetinger & Lionel Fernandez). D'autres propositions se situent d'avantage dans la continuité de l'oeuvre des artistes de la constellation GRM : Sound collage, usage majeur du dispositif en terme de spatialisation, jeu constant sur l'objet sonore, son usage et sa dénaturation (Flora Yin-Wong, Olivia Block). Certaines des pièces, plus "classiquement" ambient, reposent sur une construction linéaire mais au caractère englobant et contemplatif, où la richesse des textures est plus facile à percevoir (Puce Mary, KMRU, Stephen O'Malley). Beaucoup des performances plus expérimentales, improvisées, ou spécifiquement conçues pour l'acousmonium échappent aux étiquettes de part la pluralité des mondes sonores qu'elles embarquent.

Les Présences Électronique sont l'occasion de découvrir le temps de trois concerts la richesse et la diversité de ce qui se fait en terme de musique électronique dans d'excellentes conditions d'écoute. La nature expérimentale de ce qui est joué est à double tranchant. Les résultats issus d'une telle démarche peuvent être perçus et appréciés de façons très différentes en fonction de la sensibilité musicale et l'état de fatigue de l'auditeur. J'ai par exemple du mal à trouver de la légitimité lorsque le dispositif n'est utilisé ni pour ses capacités de spatialisation, ni pour la mise en valeur d'une certaine richesse harmonique. Certaines des performances peuvent s'avérer extrêmement absconses et décousues jusqu'à en devenir irritantes, ou au contraire mémorables et sources d'inspiration (particulièrement pour le music nerd et le musicien du dimanche). Les conditions d'écoute sont théoriquement optimales. Le format et l'ambition des oeuvres produites sont toutefois contraints et par - j'imagine - la courte durée du séjour des artistes au studio, et par l'immobilité de l'auditoire. D'autres systèmes, comme le 4DSound, permettent au public de se déplacer dans la salle et de physiquement explorer l'oeuvre et son étendu.

L'expérience est globalement positive et bienvenue. Ces concerts sont très abordables en terme de prix, et accessibles à un public large, pas nécessairement féru de musique électronique mais juste un peu curieux et ouvert d'esprit.

 

En savoir plus

Lien : Présences électroniques 2023 (INA)
Lien : Connaissez-vous l'acousmonium ? (INA)
Lien : INA grm
Lien : 4DSound